Naissance d’une famille
2017 | 79 min 14 s
Sélections et prix
Sélection officielleHot Docs 2017
Sélection officielleCinefest Sudbury 2017
Sélection officielleCalgary International Film Festival 2017
Prix spécial du juryImagineNATIVE 2017
Prix du publicEdmonton International Film Festival 2017
Sélection officielleCinequest Film & VR Festival 2017
Prix Kathleen ShannonYorkton Film Festival 2018
« Nous avons été élevés par des Blancs anglophones, coupés de tout lien avec notre peuple, notre langue et notre culture. Bien que nous ayons été aimés, nous étions des étrangers au sein de familles dont les grands-parents, les oncles, les tantes et les cousins n’étaient pas les nôtres. » — Betty Ann Adam
Quand une réunion de famille n’en est-elle pas tout à fait une ?
Lorsque les membres de la famille ne se sont jamais rencontrés.
Adoptés très tôt par des familles distinctes disséminées en Amérique du Nord, trois sœurs et un frère se rencontrent pour la première fois dans ce documentaire profondément émouvant de la réalisatrice Tasha Hubbard.
Betty Ann, Esther, Rosalie et Ben, aujourd’hui d’âge moyen, sont retirés à leur jeune mère dénée lors de la terrible « rafle des années soixante » qui sévit au Canada. Ils figurent parmi les quelque 20 000 enfants autochtones enlevés à leur famille entre 1955 et 1985 pour être confiés à l’adoption par des Blancs ou être placés en foyers nourriciers. Chacun ayant suivi son parcours au sein d’une famille possédant sa culture et ses valeurs propres, aucun souvenir commun ne les unit. Naissance d’une famille nous invite à partager la douleur, les appréhensions et les joies d’où naîtra leur famille.
Frère et sœurs se rencontrent pour la première fois à Banff, en Alberta, où ils passent une semaine à échanger au sujet de leur mère et se racontent leur difficile parcours d’enfants adoptifs ou en famille d’accueil. Alors qu’ils s’emploient à rassembler les pièces de leur histoire, des liens se nouent parmi les rires et une famille prend forme.
Description longue
Quand une réunion de famille n’en est-elle pas tout à fait une ?
Lorsque les membres de la famille ne se sont jamais rencontrés.
Adoptés très tôt par des familles distinctes disséminées en Amérique du Nord, trois sœurs et un frère se rencontrent pour la première fois dans ce documentaire profondément émouvant de la réalisatrice Tasha Hubbard.
Betty Ann, Esther, Rosalie et Ben sont retirés à leur jeune mère dénée lors de la terrible « rafle des années soixante » qui sévit au Canada. Ils figurent parmi les quelque 20 000 enfants autochtones enlevés à leur famille entre 1955 et 1985 pour être confiés à l’adoption par des Blancs ou être placés en foyers nourriciers. Après dix années de recherches, Betty Ann, l’aînée de la fratrie, retrouve un à un ses sœurs et son frère, tous aujourd’hui d’âge moyen. Chacun ayant suivi son parcours au sein d’une famille possédant sa culture et ses valeurs propres, aucun souvenir commun ne les unit. Naissance d’une famille nous invite à partager la douleur, les appréhensions et les rires qui conduiront à la création de leur famille.
Avec une sensibilité et une discrétion immenses, la réalisatrice filme la première rencontre de ces inconnus à Banff, en Alberta. Ancêtres, culture, langue, fratrie : tout leur est étranger. Rempli à la fois d’espoirs et de craintes, chacun s’interroge sur les liens qui seront tissés, sachant bien qu’on ne comble pas aisément un manque installé depuis toujours.
Durant la semaine qu’ils passent ensemble à Banff, frère et sœurs échangent, se racontent leur vie d’enfants adoptifs ou en famille d’accueil. Betty Ann, la seule à avoir rencontré leur mère, Mary Jane, communique aux autres les renseignements personnels qu’elle possède sur elle et évoque les conséquences possibles du pensionnat.
Anecdotes et photos laissent entrevoir aux protagonistes la vie de leur mère. Chaque nouveau récit à son sujet tient à la fois du cadeau et du déchirant rappel de leur perte. Alors qu’ils s’emploient à rassembler les pièces de leur histoire commune, des liens se nouent et une dynamique familiale émerge.
Matériel promotionnel
Bande-annonce
Clip 1
Clip 2
Clip 3
Clip 4
Clip 5
Q et R avec Tasha Hubbard
- Votre principale protagoniste, Betty Ann, est une journaliste reconnue qui toute sa vie a souhaité raconter l’histoire de sa famille. Elle l’a protégée farouchement lorsque les médias l’ont pourchassée au fil des ans pour en connaître les détails, mais c’est à vous qu’elle a confié le soin d’en faire le récit. Comment avez-vous établi ce lien de confiance avec elle, puis avec ses sœurs, Rosalie et Esther, et son frère Ben ?
Betty Ann et moi nous étions liées d’amitié en 2004, au moment du tournage de mon documentaire Le choc de deux mondes, l’histoire d’un Autochtone du nom de Darrell Night que la police avait abandonné aux abords de Saskatoon au milieu de l’hiver. Betty Ann était parmi les journalistes affectés à cette affaire, et au fil des ans, nous avons discuté ensemble à plusieurs reprises des questions que soulève le film. Il y a environ deux ans, nous nous sommes souvenues que le dixième anniversaire de la sortie du Choc de deux mondes approchait à grands pas et nous avons organisé ensemble un événement lié au film à Saskatoon.
Nous avions aussi échangé sur le fait que nous étions issues de milieux similaires. Donc, lorsque Betty Ann est venue me présenter le projet, elle savait que je comprendrais ce qu’allait signifier cette rencontre entre les membres d’une famille qui ne s’étaient jamais vus. Comme je n’étais pas certaine, alors, de pouvoir me charger d’un nouveau projet, nous avons discuté de la possibilité qu’elle réalise le film avec mon aide. Mais finalement, il était logique que j’assume la réalisation, parce qu’il s’agissait pour elle d’un récit tellement personnel. Elle se sentait avant tout responsable à l’égard de sa famille, alors il valait mieux que ce soit moi qui prenne la responsabilité du film. Nous avons établi ce premier lien de confiance au moment de nos conversations sur la démarche et l’intention du film, et il lui a fallu beaucoup de courage pour permettre à quelqu’un d’autre de guider le déroulement de l’histoire.
Et puis, bien sûr, Betty Ann avait parlé de moi à ses sœurs et à son frère avant que je fasse leur connaissance. Mais lorsque je suis allée les rencontrer, je ne les ai pas filmés tout de suite. J’ai simplement bavardé avec eux sur un coin de table. J’essaie toujours de me présenter aux protagonistes de mes films en leur disant qui je suis et pourquoi je fais le film, parce que, comme je m’apprête à leur poser des questions personnelles, je tiens à ce qu’il y ait une réciprocité. Et dans ce cas-ci, cette démarche était d’autant plus significative qu’ils se trouvaient sur le point de faire ce que j’avais fait moi aussi : rencontrer ma propre famille pour la première fois. Ils m’ont posé des questions auxquelles j’ai accepté de répondre. En fait, nous avons simplement conversé en toute franchise. Alors, lorsque nous avons filmé leur première rencontre à l’aéroport, ils savaient déjà toute l’importance que j’accordais à leur histoire.
- Ce film aborde des questions très douloureuses. Betty Ann, Rosalie, Esther et Ben auraient tous eu une vie bien différente s’ils avaient grandi ensemble, ou à tout le moins, s’ils avaient pu communiquer les uns avec les autres. Comme être humain, vous souhaitiez respecter leur besoin de créer un lien et d’établir entre eux des rapports authentiques, mais en qualité de réalisatrice, il vous fallait aussi raconter une histoire. À quelles difficultés vous êtes-vous heurtée en négociant cet équilibre ?
L’un des points dont nous avions convenu avec Betty Ann, Rosalie, Esther et Ben était que nous nous trouvions sur les lieux à leur invitation, et qu’ils conservaient la pleine maîtrise de la situation. Nous leur avons assuré qu’ils pouvaient nous demander de quitter les lieux à n’importe quel moment, parce que s’il s’agissait pour moi, réalisatrice, de raconter une histoire, cette rencontre représentait en revanche pour eux un moment fondamental de leur vie que je ne voulais en aucun cas gâcher. Nous nous étions mis d’accord sur certains paramètres : nous aurions deux caméras, ce qui nous éviterait dans la mesure du possible de reprendre des scènes, et nous allions tâcher de faire en sorte qu’ils n’aient pas à attendre que nous nous installions.
Ils allaient déterminer ce qu’ils voulaient faire et quand, et nous allions simplement les accompagner. J’ai précisé que nous n’allions pas filmer à la manière de la téléréalité et leur braquer une caméra sous le nez dès le réveil ! Que nous allions nous efforcer de montrer à quoi ressembleraient leurs journées durant cette quête entreprise pour devenir une famille. Je leur ai indiqué que nous chercherions chaque jour à maintenir un fragile équilibre en n’essayant pas de pousser les choses trop loin, mais en tentant néanmoins de capter l’essence de ce qu’ils vivaient.
Un jour, ils ont fait une grande sortie. Ils sont allés dans les champs de glace et ont marché sur la promenade suspendue. Nous avons eu quelques soucis et ils ont dû nous attendre. Le lendemain, ils avaient prévu une promenade à bord d’une télécabine. Je leur ai téléphoné pour leur annoncer que nous allions prendre un petit répit jusqu’au tournage du soir, ce qui leur donnerait l’occasion de sortir sans nous. Ils étaient bien contents, mais ils se sont tellement amusés qu’à leur retour ils nous ont dit : « Nous aurions aimé que vous soyez là ! » Nous avons été très touchés de constater qu’ils auraient souhaité nous voir partager ce plaisir avec eux.
- Votre style cinématographique s’étend du documentaire politique percutant, par exemple Le choc de deux mondes, à l’animation lyrique, comme dans Buffalo Calling. En ce qui a trait à Naissance d’une famille, vous avez opté pour une approche fondée sur l’observation empathique. S’agissait-il d’un choix conscient, ou y êtes-vous arrivée naturellement en travaillant avec Betty Ann ?
Je crois que tout ça est en partie attribuable au fait que je n’ai pas fréquenté d’école de cinéma. J’ai toujours appris grâce à des mentors, et sur le tas. J’adore le défi que représente la réalisation d’un film d’un style nouveau pour moi. En ce qui concerne Le choc de deux mondes, le premier film que j’ai fait seule, j’ai reçu du soutien et des conseils, mais il s’agissait pour moi d’apprendre à raconter une histoire très intense. De trouver la meilleure façon de procéder. Une fois que j’ai eu terminé, je me suis dit : « Bon, je l’ai fait. Je serai en mesure de refaire un film comme celui-là et je le ferai peut-être un jour, mais à présent, j’aimerais passer à autre chose. » Buffalo Calling est un défi que je me suis lancé : comment puis-je raconter une histoire sans paroles, de façon purement visuelle ?
Et lorsque j’en suis arrivée à Naissance d’une famille, je visionnais des documentaires d’observation créés à partir des années 1970 pour un cours de cinéma que je donnais, et j’ai songé au fait que je n’avais jamais réalisé de film de ce genre. Et puis j’avais vu le documentaire Western des frères Ross à Hot Docs en 2015 et j’avais aimé la façon dont ils se plongeaient dans cet univers et le présentaient au public sans narration. Peu après, l’ONF a pris part au projet, et la productrice Bonnie Thompson m’a demandé comment je souhaitais aborder ce film. Je voulais que les gens pensent aux membres de leur propre famille et se demandent comment la vie se serait passée s’ils n’avaient pas grandi ensemble et partagé une foule d’expériences. Je me disais que de voir les événements se dérouler serait plus percutant que d’en entendre le récit.
- Le caractère intime de Naissance d’une famille et l’accès qui nous est donné à cette intimité découlent de votre point de vue particulier sur l’expérience de Betty Ann, Rosalie, Esther et Ben. Parlez-nous un peu de votre histoire et de son incidence sur la façon dont vous avez abordé ce film.
Ma mère biologique m’a remise aux services sociaux dès ma naissance. Elle était très jeune et mon père avait traversé les difficultés qu’ont connues beaucoup d’Autochtones de sa génération, entre autres les pensionnats. J’ai été adoptée à l’âge de trois mois par un jeune couple d’agriculteurs en Saskatchewan. Mon père adoptif est décédé quand j’étais jeune, et ma mère adoptive s’est engagée à me mettre en rapport avec ma famille biologique lorsque je serais un peu plus âgée et à m’appuyer dans cette démarche. J’avais quinze ans au moment où nous avons commencé toutes les deux à rechercher mes parents naturels.
Les demandes présentées aux services sociaux et au ministère des Affaires indiennes n’ayant abouti à rien, mon beau-père nous a suggéré de faire appel à un avocat cri qui avait été parmi ses compagnons de classe au secondaire. L’avocat a tout de suite trouvé mes parents. Je les ai rencontrés tous les deux à environ trois semaines d’écart, puis sur une période de cinq ans j’ai peu à peu fait la connaissance de mes demi-frères et demi-sœurs, dix au total. J’ai donc vécu la même situation que Betty Ann, Rosalie, Esther et Ben : j’ai des frères et des sœurs qui me ressemblent, dont les gestes sont semblables aux miens, mais nous n’avons pas d’histoire commune. Nous avons eu beaucoup de chance de pouvoir nous créer des souvenirs à nous avec les années, et aujourd’hui, nous sommes quelques-uns à être devenus parents à notre tour. Nous sommes parvenus à tisser des liens familiaux, mais ce n’est pas toujours facile. Je comprends le sentiment de perte qui les habite. Je l’ai connu aussi. Cette compréhension a facilité le processus de tournage et celui du montage, aussi, pour rassembler les divers éléments de l’histoire.
Les gens tiennent parfois la famille pour acquise. Mais ce n’est pas le cas de Betty Ann, Rosalie, Esther et Ben. Vraiment pas. Ce qui contribue d’ailleurs à la beauté du film. La famille est le point de départ de toutes nos relations, et il est triste de ne pas avoir pu bénéficier de ça les uns avec les autres. Et même s’ils arrivent à commencer à créer un esprit de famille, cela n’efface pas les années de perte.
Q et R avec Betty Ann Adam
- Il s’agit pour vous d’une histoire extrêmement importante, que vous souhaitiez raconter depuis longtemps. Vous avez lancé ce projet de film et en êtes la coscénariste, mais également la principale protagoniste. Qu’avez-vous pensé de cette expérience d’être à la fois celle qui raconte l’histoire et celle qui en est le sujet ?
Au cours des années pendant lesquelles je recherchais mes frères et sœurs tout en m’employant à régler la succession de notre mère, cet objectif de nous voir un jour tous rassemblés me paraissait parfois irréaliste.
Lorsque je faisais part de ma démarche à mes meilleurs amis, j’avais l’impression de raconter des épisodes d’un récit plus long. J’avais la vague idée d’écrire sur mon expérience, mais plutôt sous la forme d’un roman.
J’avais décliné les offres d’entrevues de journalistes que mon histoire intéressait. C’était à moi de la raconter.
Lorsque je me suis proposé de faire un film sur la première rencontre de ma famille, j’ai demandé conseil à Tasha Hubbard, mais j’ai vite compris que je ne m’y connaissais pas suffisamment en cinéma.
J’ai été soulagée et ravie d’apprendre qu’elle acceptait de se charger du projet parce que j’admire tellement ce qu’elle fait ! Je n’avais pas osé lui demander de m’aider parce que je savais qu’elle planchait sur son doctorat, qu’elle enseignait, qu’elle s’occupait de son jeune fils et qu’elle travaillait en plus à d’autres productions.
Je lui faisais entièrement confiance, en partie parce que sa propre expérience ressemble beaucoup à la mienne.
J’ai toujours senti que nous étions entre de bonnes mains. Tasha et la productrice Bonnie Thompson nous ont laissé l’espace dont nous avions besoin pour vivre cette expérience sans être interrompus, même si les microphones et les caméras fonctionnaient.
Mon rôle dans le récit a consisté pour l’essentiel à échanger avec elles avant, et dans une moindre mesure, pendant et après le tournage. Nous voulions laisser place à une certaine spontanéité, tout en disposant au moins d’un itinéraire approximatif pour l’équipe et du temps nécessaire pour permettre au directeur de la production, Darin Wilson, d’obtenir au besoin les autorisations de tournage dans les parcs et les commerces.
Comme mes sœurs et mon frère constituaient ma première priorité, il m’a été assez facile de ne pas tenir compte de la présence des caméras.
Ils ont quant à eux tous accepté le tournage avec sérénité. Je pense qu’il représentait à leurs yeux un autre aspect agréable de cet étonnant épisode qui consistait à se découvrir une famille surgie de nulle part, puis à se retrouver à vivre entre frère et sœurs et à explorer cette nature extraordinaire.
Toute cette aventure me semblait souvent surréaliste. J’ai eu du mal à me concentrer et il m’arrivait d’être incapable d’effectuer une simple addition. Chaque fois que nous allions en ville, nous nous perdions.
- Après avoir travaillé durant des décennies comme journaliste attitrée du Saskatoon StarPhoenix, vous êtes une conteuse chevronnée. Y a-t-il des aspects de cette histoire qui ne figurent pas dans le film et dont vous aimeriez nous parler ?
Ce film n’aurait pas été réalisé sans la commissaire Marie Wilson de la Commission de vérité et réconciliation (CVR) du Canada sur les pensionnats indiens.
J’étais présente le 1er avril 2015 à Saskatoon lorsqu’elle a évoqué les imminentes cérémonies de clôture de la CVR et invité les communautés à organiser leurs propres événements. Ses observations sur les travaux et les conclusions de la Commission m’ont émue et inspirée à un tel point qu’à la fin je suis allée la voir et lui ai parlé de ma mère, Mary Jane Adam, survivante des pensionnats indiens.
J’ai dit à Marie que, lorsque j’ai obtenu le Paiement d’expérience commune (PEC) de ma mère, nous avons décidé, Rosalie (que j’avais rencontrée plusieurs années auparavant) et moi, de ne pas utiliser l’argent. Nous l’avons plutôt conservé dans l’espoir de retrouver un jour Esther et Ben et d’avoir quelque chose à partager avec eux qui nous venait de notre mère.
Lorsque j’ai entendu parler du PEC pour la première fois, j’ai eu des réticences. Je me suis demandé si accepter ce paiement revenait à se laisser acheter. Comment l’argent pourrait-il jamais fournir à notre famille une compensation pour ce qui était arrivé à notre mère, et par conséquent, nous était arrivé à nous aussi ?
Alors que je faisais les démarches pour obtenir le PEC — appels téléphoniques, formulaires, lettres, documents authentifiés —, il m’est venu à l’esprit que de l’utiliser pour réunir notre famille constituait le meilleur hommage possible à l’esprit et à l’intention des survivants qui avaient poursuivi en justice les églises et le gouvernement du Canada.
Les excuses présentées par le premier ministre devant le Parlement sont arrivées trop tard : ma mère ne les a pas entendues et elle est morte avant que nous ayons pu toucher le paiement d’indemnisation. Mais nous, ses enfants, pouvions nous servir de cet argent pour commencer à réparer les torts que les politiques fédérales avaient causés à notre famille.
Lorsque j’ai fait part de ce projet à Marie, nous attendions qu’Esther obtienne son passeport pour fixer la date de notre rencontre.
Marie a tout de suite réagi en me demandant : « Qui va produire le document de cette rencontre ? »
J’ai tenté de prendre sa question un peu à la blague en lui disant que j’écrirais peut-être un livre sur le sujet, mais elle parlait sérieusement et elle a insisté. Alors, puisqu’une commissaire de la CVR et ancienne journaliste et directrice régionale de CBC North affirmait que mon expérience méritait d’être enregistrée et partagée, je l’ai entendue.
Le film a pris forme avec une rapidité inhabituelle. J’ai communiqué avec Tasha au début de 2015. Elle a fait part du projet à l’ONF, et en août, nous avions le feu vert. Elle a commencé le tournage et les entrevues à la maison dès septembre, et nous nous sommes réunis à Calgary le 16 septembre 2015.
- Qu’avez-vous ressenti en visionnant le film, lorsque vous vous êtes vus réunis pour la première fois ?
C’était émouvant. Et très enrichissant de pouvoir revivre ce moment.
- Où Rosalie, Esther et Ben se trouvent-ils maintenant, et comment vont-ils ?
Depuis notre première rencontre, nous maintenons tous un contact régulier. Nous nous sommes rassemblés une deuxième fois — c’était en fait notre première réunion — en juin 2016 dans la communauté où habite Rosalie, en Colombie-Britannique. Certains conjoints et enfants sont venus aussi, ce qui était formidable.
Nous avons eu une autre semaine pour approfondir nos relations et créer des souvenirs. Quelques-uns de nos enfants ont pu côtoyer leurs cousins pour la première fois de leur vie : l’établissement de ces nouveaux liens familiaux qui vont se transmettre aux générations futures nous a procuré beaucoup de joie.
Rose vit toujours « au paradis ». C’est ainsi qu’elle appelle sa communauté, située au bord d’un lac de l’intérieur de la Colombie-Britannique. Lorsqu’elle ne travaille pas, elle est dehors au coin du feu, ou occupée à remporter des prix toutes les semaines à la salle de quilles. Ce qui, selon ses dires, fait d’elle « une athlète professionnelle chèrement payée ».
Ben est toujours en Alberta, où il travaille en aménagement paysager. Il partage fidèlement les nouvelles de la famille, parle tous les jours à ses sœurs sur Facebook et leur téléphone régulièrement.
Esther vit encore sous le soleil de la Californie, où nous nous retrouverons en 2017 afin de visionner le film ensemble pour la première fois.
LA RAFLE DES ANNÉES 1960
Entre la fin des années 1950 et les années 1980, des milliers d’enfants autochtones du Canada ont été arrachés à leurs parents pour être placés dans des foyers d’accueil ou adoptés par des familles non autochtones, au pays et à l’étranger.
Jamais les parents naturels et les communautés n’ont su où leurs enfants avaient été emmenés et jamais ils n’ont eu la possibilité de les récupérer.
Nombre d’enfants ont été ballottés d’un foyer à un autre et ont grandi sans développer de sentiment d’appartenance à un groupe ou à un milieu. Même s’ils connaissaient leurs origines autochtones, beaucoup ne pouvaient s’identifier aux parents, à la communauté, à la langue et à la culture qu’ils avaient perdus.
À l’âge adulte, certains ont renoué avec leur famille et leur culture, mais ils ont souvent l’impression d’avoir un pied dans chaque monde et se demandent s’ils ont leur place dans l’un ou dans l’autre.
Cette pratique consistant à retirer les enfants autochtones de leur milieu familial a pris de l’ampleur lorsqu’on a mis fin au système des pensionnats indiens du Canada, alors que, pendant un siècle, des générations successives ont grandi en institution, privées de la présence de parents aimants.
Les conséquences des pensionnats ont été catastrophiques : désintégration sociale, alcoolisme et pauvreté ont ravagé nombre de communautés autochtones, créant ainsi les conditions qui ont mené à ce qu’on a appelé la rafle des années 1960.
En 1959, les enfants autochtones représentaient moins de 1 % des enfants pris en charge par les services de protection de l’enfance. Dix ans plus tard, ils en constituaient 40 %.
Aujourd’hui, on continue de retirer les enfants autochtones de leur milieu familial. On désigne maintenant cette séparation forcée sous le nom de rafle du millénaire.
En 2016, le Bureau d’assistance à l’enfance et à la famille de la Saskatchewan estimait que 78 % des enfants en placement familial étaient autochtones.
Images
Équipe
Générique
Entre 1955 et 1985, le gouvernement canadien et les provinces ont retiré quelque 20 000 enfants autochtones de leur famille et les ont confiés à des organismes de protection de la jeunesse.
Quatre enfants furent enlevés à Mary Jane Adam, une mère seule de la Nation dénée.
Ben
Enlevé en bas âge en 1965
Rose
Enlevée en bas âge en 1963
Esther
Enlevée en bas âge en 1961
Betty Ann
Enlevée en bas âge en 1961
Betty Ann, l’aînée, a mis plusieurs décennies à retrouver son frère et ses sœurs.
Pour la première fois, les trois enfants de Mary Jane vont se trouver ensemble.
Merci à
Betty Ann
Esther
Rose
Ben
Scénario
Tasha Hubbard et
Betty Ann Adam
Réalisation
Tasha Hubbard
Productrice
Bonnie Thompson
Producteur exécutif
David Christensen
Monteur
Hans Olson
Monteur-conseil
Scott Parker
Directeur photo
Allan Leader
Cameramen
Thomas Dudley
Jim Moule
Directeur de production
Darin Wilson
Prise de son en extérieur
Per Asplund
Brad Martin
Montage sonore
Perry Blackman
Blackman Productions
Mixage
Serge Boivin
Coloriste
Serge Verreault
Titres
Jacques Bertrand Simard
Gestion des données
Oliver Lessard
Transcription
Patricia Garry
Remerciements particuliers à
Marie Wilson
The Willie Dunn Family
Trisha Pollard
Connie Grace
Angelika Eirisch
Joanne Wilson
Ian Burt
Lucia Diakuw
Quannah Duquette
Robert McIntyre
Joanne Taylor
Gisele Gordon
Danis Goulet
Lisa Jackson
Marcel Balfour
Tanya Harnett
Eleanore Sunchild
Raven Sinclair
Heather Persson
Rose Pacquette
Raymond Adam
Remerciements à
Aéroport de Calgary
Enterprise Rent a Car, Aéroport international de Calgary
Ville de Banff
Parc national Banff
Buffalo Nations Luxton Museum
Douglas Fir Resort & Chalet
Fairmont Banff Springs/Château Lake Louise
Spirit of Christmas
Banff Photography
Great Canadian Dollar Store
Glacier Adventure Tour
Glacier Skywalk
Brewster Inc.
Musique
I Pity the Country
Willie Dunn
Disponible sur
Native North America (VOL. 1)
Aboriginal Folk, Rock And Country 1966 -1985
℗ 2014 Light in The Attic Records & Distribution
Coordination de la production
Jasmine Pullukatt
Ginette D’Silva
Faye Yoneda
Supervision de la production
Mark Power
Esther Viragh
Directrice du marketing
Leslie Stafford
Administration des programmes
Bree Beach
Ginette D’Silva
Gestionnaire des opérations du centre
Darin Clausen
Directrice exécutive, Programmation et Production, Programme anglais
Michelle Van Beusekom
Sous-titres
Robert Paquin, Ph. D.
Relations de presse
-
Marie-Claude Lamoureux
Attachée de presse – Montréal
C. : 438-304-6358
m.lamoureux@onf.ca | @MC_ONF
-
L’ONF en bref
Fondé en 1939 et unique en son genre, l’Office national du film du Canada (ONF) produit, coproduit et distribue des documentaires et des films d’animation distinctifs, engageants, pertinents et innovants. Incubateur de talents, il est un des plus grands laboratoires de création au monde. Depuis plus de huit décennies, l’ONF permet aux Canadiennes et aux Canadiens de se raconter et de se rencontrer. Ses films sont de plus une ressource éducative fiable et accessible. L’ONF possède également une expertise reconnue mondialement en préservation et en conservation, en plus d’une riche collection vivante d’œuvres qui constituent un pilier important du patrimoine culturel du Canada. Jusqu’à maintenant, l’ONF a produit plus de 14 000 œuvres, dont 6500 sont accessibles gratuitement en ligne sur onf.ca. L’ONF ainsi que ses productions et coproductions ont remporté au-delà de 7000 prix, dont 11 Oscars et un Oscar honorifique récompensant l’excellence de l’organisation dans toutes les sphères de la cinématographie.