LE SUJET
2018 | 10 min
Image par image et pixilation
Sélections et prix
Sélection officielle Annecy 2018
Compétition - Court métrageAnima Mundi International Animation Festival 2018
Sélection officielleQuinzaine des réalisateurs - Cannes 2018
Sélection officielle - Short CutsToronto International Film Festival 2018
Sélection officielleOttawa International Animation Festival 2018
Sélection officielleVancouver International Film Festival 2018
Sélection officielleFIN Atlantic International Film Festival 2018
Choix gagnant SICAFSICAF Seoul International Cartoon and Animation Film Festival 2018
Meilleur court métrage d'animationRVQC 2019
Sélection officielleTIFF Canada’s Top Ten 2018
Un animateur fouille son propre corps pour en extirper les souvenirs, les émotions et les angoisses qui viendront nourrir son œuvre. De la peau d’abord coupée au scalpel surgissent divers objets symboliques évoquant son passé. Arrivé au cœur après s’être fracassé les côtes, il parvient à identifier le poids dont il veut se délester.
Description détaillée
Créer, c’est plonger au plus profond de soi! L’artiste s’engage dans un processus d’introspection dont il ne ressort jamais indemne. Il creuse et fouille en lui-même, à la recherche de la source de ses angoisses, espérant ainsi trouver sa libération.
Dans Le sujet, le réalisateur Patrick Bouchard ose se mettre en scène : l’animateur fait face à son alter ego sous la forme d’un moulage grandeur nature de son propre corps. S’amorce alors une confrontation physique entre la marionnette humaine et la marionnette de terre. Percé, coupé, ciselé, le corps livre ses secrets et se révèle être une mécanique complexe alors que surgissent divers objets, comme ce microscope qui permet d’observer le mouvement des fluides vitaux, comme cet étrange manège qui évoque autant le plaisir et la jouissance que la peur…
Entre l’exhumation de son héritage religieux et le poids qui pèse sur sa poitrine, l’artiste se déleste de son passé et se projette dans sa création, qui finit par prendre vie…
Le sujet entraîne les spectateurs dans une expérience viscérale unique! Les objets et la matière sonore y tissent une toile texturée de mille sensations et font de ce film l’œuvre la plus personnelle de Patrick Bouchard, qui en signe aussi la musique et reprend plusieurs thèmes déjà présents dans Les ramoneurs cérébraux et dans Bydlo.
Entrevue avec Patrick Bouchard
D’un certain point de vue, Le sujet renvoie directement à votre premier film, Les ramoneurs cérébraux. Dans les deux cas, il s’agit d’entrer à l’intérieur du corps d’un artiste (un musicien dans Les ramoneurs cérébraux) pour libérer celui-ci. Est-ce un lien conscient ou inconscient ?
Au moment où j’ai pensé Le sujet, c’était inconscient, mais j’ai rapidement fait le rapprochement entre les deux films. Je m’attaque beaucoup au corps dans Le sujet, mais la tête demeure entière, elle n’est jamais explorée. À l’inverse, dans Les ramoneurs cérébraux, tout se passe dans la tête du personnage : les deux ramoneurs sont injectés dans son cerveau pour y mettre de l’ordre. En ce sens, les deux films sont complémentaires.
On entend souvent que les cinéastes font toujours le même film. C’est une boutade, mais il y a quelque chose de vrai là-dedans. Le corps, la manière dont il est le réceptacle de ce que nous sommes, la façon dont toute notre vie demeure en nous tant par la mémoire et par l’inconscient que par notre conditionnement, nos cicatrices et nos vieilles blessures : ce sont des questions qui m’animent.
La création semble être un motif important de votre travail. Bydlo est un film qui met en scène autant la genèse que la fin du monde. Dehors novembre est une chanson sur la mort d’un artiste… Qu’est-ce que créer, pour vous ?
Pour moi, créer est un état qui relève davantage de l’inconscient que du conscient. Lorsque j’essaie de rendre ma création trop cérébrale, de trop réfléchir, cela me paralyse. Mon moteur de création ne se situe pas au niveau de la pensée rationnelle, il est plutôt alimenté par une sorte de feu qui me prend dans le plexus solaire. C’est instinctif. C’est quelque chose de plus proche d’un état émotif. C’est de l’ordre du ressenti… Certains artistes peuvent fonctionner autrement, mais dans mon cas, la création passe par un état physique, je dois la sentir dans mon corps. Le rationnel et le conceptuel arrivent dans un deuxième temps.
Ça veut dire que parmi toutes les intuitions, parmi toutes les idées qui surgissent, certaines créent une forme d’excitation. Cette excitation, ou plutôt cette passion, est le carburant qui permet d’aller au bout de ces idées. C’est ce qui fait que l’animation n’est pas simplement un processus mécanique.
Pour faire fructifier cette excitation, il faut avoir de l’espace, un espace d’improvisation, un espace d’expression. Il faut des moments magiques, des plans qui permettent les envols créatifs… Quand tu suis un découpage très précis, cet espace a tendance à se raréfier. Quand le découpage est trop contraignant, il n’y a pas de place pour soutenir ce niveau d’engagement, surtout lorsqu’une production dure des années.
Pour Le sujet, nous avons mis en place un processus de production qui a permis de garder cette flamme, ce degré d’énergie… À la base du projet, il y avait ce moulage de mon corps, puis divers objets. Il fallait que le film jaillisse du corps.
Vous savez, il faut être obsessionnel, voire acharné pour se rendre au bout d’un film.
À quel moment avez-vous décidé de réaliser un moulage de votre propre corps pour Le sujet ?
J’ai eu la volonté de travailler à partir du moulage d’un corps il y a très longtemps. Bien avant ce projet de film, d’ailleurs. J’y pensais déjà il y a plus de quinze ans. Je crois qu’à l’origine de tout il y a le tableau Le vieux guitariste de Picasso. C’est une image qui m’habite depuis très longtemps, notamment parce que je suis fasciné par les mains. Je trouve ça très beau, j’aime la manière dont les mains bougent… J’avais le fantasme de créer le personnage de Picasso grandeur nature et de le faire jouer. Probablement parce que ce vieux guitariste est une projection de moi-même, parce que je me voyais à travers lui.
L’idée de mouler mon propre corps est venue ensuite, quand il a fallu décider quel serait ce corps et qu’il était devenu évident que ça ne pourrait pas être le personnage de Picasso. Ça m’a beaucoup questionné parce que le corps moulé qu’on voit dans le film est mon corps de quarante ans. Puisque j’ai mis deux années à faire le film, mon propre corps a continué de vieillir, il s’est transformé, tandis que le corps moulé est resté le même. Alors, la relation entre ce corps moulé et mon propre corps s’est elle-même transformée…
Le processus de création du film a fait que son déroulement a été influencé par le temps qui passait, par l’actualité, par l’état du monde. La seule chose qui ne change pas, dans Le sujet, c’est le corps moulé, qui reste le même bien qu’il soit découpé, bien qu’on fouille à l’intérieur de lui.
Pouvez-vous donner un exemple de l’influence de l’actualité sur le déroulement du film ?
Le plan qui montre un mur qui s’érige et vient bloquer l’accès au carrousel, puis les barbelés qui s’ajoutent au-dessus. Tout cela est directement inspiré par l’élection de Trump, par son obsession du mur entre les États-Unis et le Mexique ainsi que par la situation en Palestine.
Vous dites que vous avez travaillé sans scénario contraignant. Votre inspiration ne s’est toutefois pas limitée à l’actualité. Qu’en est-il des objets qu’on voit dans le film et qui deviennent la matière de l’animation ?
Avant même le début du tournage, mon collaborateur Dany Boivin et moi, nous nous sommes lancés dans une collecte d’objets. J’ai notamment acheté des paniers d’objets métalliques dans des marchés aux puces. C’est d’ailleurs comme ça que nous avons récolté les robinets qui forment le carrousel. Les objets offrent en eux-mêmes des réponses aux questions. Je trouvais ces robinets très beaux, j’en ai fait un carrousel parce que c’était une façon animée de les faire apparaître. Le robinet est un objet utilitaire, mais le carrousel est une mécanique servant au divertissement. Ce carrousel s’est retrouvé dans le bas-ventre du personnage, à la hauteur des organes sexuels… C’est donc devenu une construction métaphorique. Lorsqu’on arrive en montage, tout cela devient évident, mais au moment de le faire, c’était beaucoup plus instinctif.
Parmi les divers objets avec lesquels j’ai travaillé, il y avait un microscope et un projecteur de diapositives. C’est en faisant le lien entre ces deux objets que j’ai été amené à vouloir photographier mes propres fluides : mon sang, ma salive. Je me suis donc rendu à l’Université McGill et nous avons filmé cela en laboratoire. Les images projetées dans le film montrent donc mes propres liquides corporels. Tout cela ajoute à la cohérence de l’ensemble.
Et l’enclume ?
Je suis fasciné par les enclumes parce que ce sont des objets qui subsistent. Il peut y avoir des générations d’humains qui leur tapent dessus et les enclumes sont toujours là. Par rapport à nous, ce sont presque des objets éternels, indestructibles. Le poids d’une enclume est un poids qui reste, qui ne disparaît pas facilement.
Dans Le sujet, l’autopsie commence par une image religieuse forte, une sorte de décrucifixion alors qu’un gros clou émerge du pied du personnage.
La dimension religieuse est totalement inconsciente, c’est-à-dire qu’elle est intégrée dans mon bagage culturel d’une telle manière qu’encore une fois je n’ai pas besoin d’y penser pour y faire référence. Un objet aussi banal qu’un vieux clou de voie ferrée m’a amené à le faire sortir du pied, ce qui constitue une première libération pour le personnage. Pour le spectateur, ça devient vite le poids de la religion dont le personnage se défait, mais ce n’était pas quelque chose de prémédité.
Dans les faits, je me voyais mal commencer à découper le personnage. J’ai donc fait en sorte qu’il donne lui-même un signe : le clou sort de son pied malgré moi. Après cela, c’est plus facile de se mettre à découper la jambe.
Cette scène, à laquelle s’ajoute celle de l’enclume, m’amène à dire qu’il s’agit d’un film de libération. Ce n’est certes pas un film lumineux, mais à la fin, le corps est libéré et il prend vie.
Le sujet n’est pas un film à message. C’est une expérience. Le tournage du film était une expérience, et je voudrais qu’il en soit de même pour le spectateur.
Vous avez composé la musique du Sujet. Celle-ci joue un rôle très important dans vos films. Dehors novembre et Bydlo sont d’ailleurs des courts métrages essentiellement musicaux. Qu’est-ce que la musique pour vous ?
Une pièce musicale, ça fait naître des images. C’est comme ça que j’ai fait Bydlo.
La msique a toujours fait partie de ma vie. Ça m’a toujours suivi. J’ai voulu faire de la musique bien avant de vouloir faire du cinéma. Et je me suis beaucoup investi pour apprendre la guitare, pour composer… Je suis un musicien. Je n’en ai pas fait mon métier, mais je n’ai jamais cessé de faire de la musique.
Pour moi, la musique s’apparente beaucoup à l’animation. Parce que ça se construit par le rythme. Ce sont des pratiques qui fonctionnent sur le découpage du temps. La beauté de la musique par rapport à l’animation, c’est que la spontanéité y est davantage possible. Plus jeune, je m’intéressais beaucoup à la performance musicale tandis qu’aujourd’hui je suis à la recherche des combinaisons simples qui font jaillir l’émotion.
Pour Le sujet, tout le processus du film s’est orienté vers une mise à nu, vers une expression très personnelle. Ça aurait été difficile pour moi de travailler avec un musicien dans ce contexte. Il fallait que toutes les étapes soient en cohérence.
Le processus de réalisation du film était comme un saut dans le vide. C’était vertigineux et angoissant. Et quand j’ai fait la musique, cela a été aussi douloureux que de faire l’animation parce qu’il fallait que je lutte contre mon désir de livrer une performance, il fallait que j’accepte d’aller vers le dépouillement. Après coup, je trouve que la musique ressemble au film.
Bande-annonce (17 sec.)
Bande-annonce (32 sec.)
Clip Promo
Matériel promotionnel
Images
Équipe
Générique
Scénario, animation et réalisation
Patrick Bouchard
Productrice
Julie Roy
Décors et accessoires
Dany Boivin
Animation et infographie
Pierre M. Trudeau
Montage image
Sacha Ratcliffe
Theodore Ushev
Conception sonore
Olivier Calvert
Musique originale
Patrick Bouchard
© 2018 Office national du film du Canada (SOCAN)
Réalisation – musique
Philippe Brault
Musicien
Patrick Bouchard
Artiste interprète UDA
Patrick Bouchard
Bruitage
Lise Wedlock
Assistant au bruitage
Thomas Garant
Enregistrements sonores
Geoffrey Mitchell
Mixage
Serge Boivin
Montage en ligne
Serge Verreault
Titres
Réjean Myette
Direction technique
Pierre Plouffe
Coordination technique, animation
Yannick Grandmont
Coordination technique
Jean-François Laprise
Coordination de production
Michèle Labelle
Administratrices
Diane Régimbald
Karine Desmeules
Adjointe administrative
Diane Ayotte
Affranchissement de droits
Sylvia Mezei
Agentes de mise en marché
Karine Sévigny
Geneviève Bérard
Relationniste de presse
Nadine Viau
Relations de presse
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Nadine Viau
Attachée de presse – Montréal
C. : 514-458-9745
n.viau@onf.ca
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L’ONF en bref
L’Office national du film du Canada (ONF) est un chef de file dans l’exploration de l’animation comme forme d’art, de mise en récit et de contenu innovateur pour les nouvelles plateformes. Il produit des œuvres d’animation audacieuses dans ses studios situés à Montréal, mais aussi partout au pays, et collabore avec les créateurs et créatrices les plus en vue de la planète dans le cadre de coproductions internationales. Les productions de l’ONF ont remporté plus de 7000 récompenses, dont, en animation, 7 Oscars et 7 Grands Prix du Festival d’Annecy. Pour accéder à ces œuvres uniques, visitez ONF.ca.