BAM
2015 | 5 min 48 s
Synopsis
BAM est une histoire de colère. Dans un quartier défavorisé hanté par des dieux primitifs, un jeune boxeur sans prétention cherche à comprendre les conséquences troublantes de son tempérament explosif, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du ring. Alors que plusieurs des films de Howie Shia (Flutter, Ice Ages) juxtaposent archétypes mythologiques et urbanité moderne, BAM prend une tournure résolument plus sombre : les combats du jeune boxeur sont aussi héroïques qu’ils sont douloureux, aussi constants qu’ils sont aliénants. La violence qui l’habite est-elle une réaction conditionnée, un réflexe inné ou un droit divin?
Batterie cacophonique et électro grinçante s’allient à la finesse de la facture bande dessinée et à la rapidité de l’action. Les instincts les plus primaires du protagoniste sont martelés à grands coups de modernité et de civilité pour exposer le portrait à la fois brutal et poétique d’un héros classique se débattant dans un monde contemporain.
Synopsis court
BAM est une histoire de colère. Dans un quartier défavorisé hanté par des dieux primitifs, un jeune boxeur sans prétention cherche à comprendre les conséquences troublantes de son tempérament explosif, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du ring. La violence qui l’habite est-elle une réaction conditionnée, un réflexe inné ou un droit divin? Combinant une bande sonore urbaine et le dessin animé réaliste, BAM fait le portrait à la fois brutal et poétique d’un héros classique se débattant dans un monde contemporain.
Extrait #1
Extrait #2
Équipe
Entretien avec Howie Shia : Séance de questions et réponses sur BAM
Parlons d’abord de ce film dans le contexte de vos autres œuvres. Les thèmes de l’environnement urbain et de la densité de population semblent vous préoccuper, comme en témoignent quelques-uns de vos films (Flutter, Ice Age). BAM s’ouvre sur une scène de métro défilant à toute vitesse tandis que des gens attendent sur le quai… Pourquoi vous intéressez-vous tant à ce type d’environnement en particulier?
Je pense que mon intérêt pour le milieu urbain est en fait un symptôme de ma passion pour la mythologie classique. Je suis fortement interpellé par le lyrisme et les rituels primitifs des anciens mythes et j’aime fouiller les facettes de la civilité, de la technologie et de la politique des cités modernes pour voir si l’on trouve encore des traces de ces anciens récits dans leurs fondations. Par exemple, peut-on établir une corrélation entre le mélodrame d’Atlas condamné à porter la voute céleste sur ses épaules et l’exquis prosaïsme de Prufrock qui prend la mesure de sa vie avec des cuillères à café?
Dans le métro, on peut en tout temps se retrouver entre un vendeur fébrile dans la vingtaine qui vit sa vie sur Instagram et une vieille immigrante autoritaire qui tente tout le jour durant de chasser les superstitions tenaces de son pays d’origine. J’aime explorer l’espace entre ces deux personnes qui n’ont en commun que le dernier modèle de iPhone.
J’aimerais parler du thème central du film : la colère et la rapidité à laquelle cette émotion semble parfois nous envahir. Dans notre culture, les hommes sont généralement peu enclins à parler de leurs émotions et de leur façon de les gérer. Même s’il est socialement « acceptable » que les hommes expriment leur colère, il reste que dans une culture hypermasculinisée, on assiste rarement à de franches discussions sur l’intensité de ses émotions. Qu’est-ce qui vous a inspiré à aborder ces sujets?
Peu importe le sexe, je pense que le film porte autant sur la fonction de la colère dans nos vies et nos communautés que sur ses origines. Il parle de ce qui se produit lorsqu’on soumet les archétypes classiques aux jugements modernes. Mon grand-père était un homme sévère et imposant — il a été chef du corps de police de Taipei, puis commissaire de police à l’échelle nationale; il était aussi un calligraphe et poète admiré. Aujourd’hui, cette combinaison de délicatesse et de force physique semble improbable, voire contradictoire, alors que c’était possible à cette époque et dans ce milieu. Dans les arts, au moins, les héros classiques sont définis comme des êtres possédant une grande intelligence intellectuelle et artistique ainsi qu’un incroyable potentiel de violence justifiée. Ulysse, Beowulf, Zatoichi, Batman sont tous des êtres brillants et sensibles; ce sont aussi tous des cogneurs. Je crois que BAM dérive surtout d’un questionnement par rapport à la personne que serait mon grand-père s’il devenait adulte à mon époque. Aurait-il à choisir entre sa présence physique ou son côté intellectuel. À quoi peut-on employer toute cette puissance quand on n’a pas de guerre à mener ou de dragon à terrasser?
Vous êtes reconnu pour votre style bande dessinée sobre et soutenu, lequel à mon avis convient très bien aux thèmes de ce film (montée des émotions, violence). Comment avez-vous développé cette esthétique? Quelles sont les influences qui selon vous ont conditionné votre œuvre sur le plan visuel et à quels genres d’arts visuels étiez-vous exposé pendant votre jeunesse?
Je ne sais pas si je réussis, mais j’essaie de créer une facture visuelle différente pour chacun de mes projets. Pour BAM, j’ai voulu emprunter quelques-uns des éléments que j’ai expérimentés dans mon travail d’illustration — une manière différente de tracer les contours et les textures, ainsi qu’un trait plus précis — pour les appliquer à l’animation. Je voulais aussi explorer la possibilité d’atténuer le dynamisme dans la composition — pour occuper l’écran plutôt comme une scène de théâtre et tenter de raconter une histoire dramatique en me reposant simplement sur la prestation, le rythme et les esquisses sans recourir aux effets extrêmes de raccourci et aux angles échevelés qui semblent si populaires actuellement.
Pendant ma jeunesse, j’ai été exposé à des influences variées : les bandes dessinées de partout — autant les bandes dessinées américaines de superhéros que les bédés de D&Q [Drawn & Quarterly] et les mangas — ainsi que les œuvres d’art exposées dans les musées qui ont toujours stimulé mon intérêt. À Saskatoon, où j’ai grandi, il y avait une extraordinaire galerie d’art appelée Mendel qui a permis à la ville entière de découvrir un mélange éclectique de tableaux.
Dans BAM, il y a très peu d’éléments en couleurs, ce qui fait d’autant plus ressortir la pomme jaune dans la scène de la bibliothèque. Qu’est-ce qui justifie ce choix? Qu’est-ce que le blanc et noir offre de plus que la couleur? Et quel effet produit l’ajout sporadique d’éléments de couleur?
BAM s’inspire très librement de la vie d’Hercule, d’où les quelques références à la mythologie. Certaines sont en couleurs et d’autres, non. Les pommes d’or, la « crinière de lion » de la petite brute du métro, « l’hydre » d’arbitres et d’entraîneurs dans le ring, etc. Pour ce qui est de la monochromie de mes films, je n’ai pas vraiment de réponse. C’est probablement parce que c’est là que se situe ma zone de confort. Cela dit, j’utilise une palette plus étendue pour mes illustrations, mais en général, mon vocabulaire de base est le noir, le blanc et une demi-teinte. Je crois que c’est en quelque sorte le caractère théâtral de ce vocabulaire que j’apprécie parce qu’il oblige à créer des univers complets et une pleine gamme d’émotions avec des moyens limités.
Pouvez-vous nous parler un peu du processus de collaboration avec vos frères Tim et Leo, pour la bande sonore du film? Vous entendez-vous toujours bien avec vos frères ou est-ce que le fait de travailler en semble crée des tensions? Comment est-ce de faire partie d’une famille d’artistes?
Mes frères et moi avons fait de l’art et de la musique ensemble toute notre vie. Il est donc difficile de faire une distinction claire entre loisir et travail. Plus souvent qu’autrement, nos réunions consistent en conversations de quinze minutes entre le souper et les séances de lutte avec nos nièces (que nous envoyons invariablement au tapis). Lorsque j’habitais Brooklyn et que Leo était à Taipei, nous échangions nos idées principalement par courriel et par Google Hangouts — généralement coiffés de chapeaux ridicules.
Pour BAM, le producteur exécutif de l’ONF Michael Fukushima a donné des instructions bien précises : la musique et le son devaient conditionner le film. J’ai commencé par réaliser une animatique à laquelle Tim et Leo ont intégré une ébauche de musique, laquelle était belle et agréable. Mais en fin de compte, et ce, grâce aux bons conseils de notre productrice Maral Mohammadian, nous avons décidé que nous voulions vraiment faire quelque chose de moins cool et de plus audacieux— un mini opéra — et utiliser des textures et des grooves contemporains que nous écoutions alors. Je venais tout juste de terminer la jaquette du CD Fast Future de Donny McCaslin et j’étais vraiment imprégné du mélange d’électronique et de jazz de ce CD et de l’arc épique des morceaux (même s’ils étaient très courts). À la même époque, j’ai découvert le nouvel opéra de George Benjamin, Written on Skin, de même que l’enregistrement par le quatuor Takács des derniers quatuors à cordes de Beethoven et j’ai demandé à Tim de trouver un moyen d’aménager l’orchestration pour créer un son à la fois riche et discordant, romantique et dur. Entretemps, Tim, avait parcouru la musique d’Ennio Morricone et, assez bizarrement, celle du Benny Hill Show, dans le but d’explorer différentes façons d’équilibrer la musique et la conception sonore. Leo s’était replongé dans l’étude des textures de l’album Bitches Brew de Miles Davis tout en s’éclatant avec les nouveaux albums de D’Angelo et Kendrick Lamar. Finalement, nous avons décidé de combiner toutes ces idées, et c’est le résultat que nous avons obtenu.
Je tiens à souligner que notre collaboration avec l’équipe du son de l’ONF (le preneur de son Geoffrey Mitchell, le mixeur Jean Paul Vialard, et la bruiteuse Karla Baumgardner) a largement contribué à enrichir le travail de Tim et Leo et à donner au film une véritable identité sonore.
Qu’est-ce qui vous attend maintenant? Avez-vous d’autres projets en cours? Pouvez-vous nous donner une idée de ce que vous mijotez et de ce qui vous allume actuellement? Même si vous ne travaillez pas sur un projet en particulier, avez-vous quelque chose en tête?
Je travaille à plusieurs choses à la fois : j’étoffe quelques histoires que je veux transposer en BD romans —dont un genre de suite à BAM. Leo, Tim et moi avons parlé de réaliser une série animée pour le Web, à Taïwan — quelque chose sur la communauté hip-hop là-bas — à laquelle on donnerait une tournure magique réaliste. Je voudrais aussi réaliser des animations pour des endroits comme des théâtres, des installations d’art, des salles de concert. Le groupe de Tim, le Worst Pop Band Ever, sortira bientôt un nouveau CD sur la panne d’électricité de 2003, et nous pensons à faire de ce lancement une sorte de spectacle interactif. Et puis je me sens enfin prêt à réaliser un projet sur Saskatoon ou un endroit qui lui ressemble : une petite ville qui entretient des liens étroits avec la vie rurale tout en aspirant à une identité plus urbaine.
Naturellement, ma priorité actuelle c’est d’aider ma femme à élever notre nouvelle petite fille. D’ailleurs, aussitôt que cette entrevue est terminée, je l’initie à l’algèbre avec des cartes-éclair.
Images
Générique
Écrit, réalisé et animé par
HOWIE SHIA
Musique et conception sonore
TIM SHIA
LEO SHIA
©2015 (SOCAN)
Animation supplémentaire
LILLIAN CHAN
JONATHAN NG
MALCOLM SUTHERLAND
Assistance à l’animation
SIMON COTTEE
JENNIFER KRICK
Musiciens
TIM SHIA: Keys, Programming, Drums
LEO SHIA: Turntables
Enregistrement de la musique
TIM SHIA
LEO SHIA
Bruitage
KARLA BAUMGARDNER
Titres
HOWIE SHIA
Montage en ligne
DENIS GATHELIER
Coordonnateur technique
STEVE HALLÉ
Direction technique
ELOI CHAMPAGNE
Coordination de production
STÉPHANIE LALONDE
DOMINIQUE FORGET
Administration
ROSALINA DI SARIO
VICTOIRE-ÉMILIE BESSETTE
Producteurs
MARAL MOHAMMADIAN
MICHAEL FUKUSHIMA
Producteur exécutif
MICHAEL FUKUSHIMA
Merci à
MARK ABERNETHY
GORDON BELRAY
NICK FOX-GIEG
LISA GRABOSKI
GEORGE HAWKEN
ROBIN JOSEPH
BEN KALINA
KIM LEOW
PPF HOUSE
ANDY SCHOENTAG
JAVIER LOVERA & GASTON SOUCY @ STUDIO 223a
SANDY WEINBERG
Merci spécial à
GEORGE & ELEANOR SHIA
Pour
JA & HMXYS
En mémoire de
DON SALUBAYBA
Relations de presse
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Pat Dillon-Moore
Attachée de presse – Montréal
C. : 514-206-1750
p.dillon@onf.ca | @PatDoftheNFB
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L’ONF en bref
L’Office national du film du Canada (ONF) est un chef de file dans l’exploration de l’animation comme forme d’art, de mise en récit et de contenu innovateur pour les nouvelles plateformes. Il produit des œuvres d’animation audacieuses dans ses studios situés à Montréal, mais aussi partout au pays, et collabore avec les créateurs et créatrices les plus en vue de la planète dans le cadre de coproductions internationales. Les productions de l’ONF ont remporté plus de 7000 récompenses, dont, en animation, 7 Oscars et 7 Grands Prix du Festival d’Annecy. Pour accéder à ces œuvres uniques, visitez ONF.ca.